Notes de lecture

Gauthier, Jean-Marie

1989-10-01

Notes de lecture

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Au coeur de la projection, le corps, ou, plus précisément, grâce à un pouvoir spécifique de projection sensorielle, le corps trouve à se représenter dans le monde environnant, s'il bénéficie des conditions de maternage adéquates. Processus fondateur de notre vie psychique, cette projection primordiale est à la base de la constitution de nos rêves en tant que phénomènes psychiques. Rêve, corps et projection deviennent ainsi comme les différents aspects d'un même mouvement, la création de l'imaginaire et de ses fonctions mentales : un corps imaginaire existe au delà du corps réel avec lequel il reste en liaison dialectique permanente.

Toute l'oeuvre de Sami-Ali depuis son livre d'ouverture, "de la projection" paru chez Payot en 1970, constitue autant de développements de cette première recherche, Destins de l'espace imaginaire, (Gallimard, 1974) du corps réel et de l'imaginaire (Dunod, 1977-1984), pathologie de l'adaptation, développement de l'individu et pression sociale (le banal, Gallimard, 1980) en sont autant de moments. C'est à partir du livre "Le visuel et le Tactile", Dunod 1984, que la pensée de Sami-Ali à propos de la psychosomatique, se précise : il existe un lien négatif entre projection et somatisation. Ce lien est démontré à partir du délire du Président Schreber et de son évolution temporelle, mais aussi à partir de ses cliniques d'allergies.

"Penser le somatique" constitue sans doute la première synthèse de cette démarche, bien que son approche bénéficie sans doute, de la lecture progressive des ouvrages précédents, et en particulier du coeur de son développement : "de la projection" réédité chez Dunod en 1900. L'originalité de l'oeuvre de Sami-Ali, dans ce champs pourtant bien labouré de la psychosomatique analytique, est de nous permettre de penser le corps dans sa réalité matérielle autant que dans ses transformations imaginaires ; ce qui devient déterminant est la nature et l'importance de leur lien dialectique. Elle évite ainsi l'écueil, signalé dans mon texte "Le temps de la somatisation", d'une hystérisation forcée de symptômes somatiques soit de son renvoi à l'analytiquement inintelligible. A remuer ainsi peu à peu bien de concepts fondamentaux de la psychanalyse, Sami-Ali finit aussi par redéfinir quelques catégories de la pensée analytique aux premiers rangs desquelles je signalerai l'autisme et la psychose, mais aussi des concepts fondamentaux tels que l'inconscient, le transfert et l'interprétation.