Le contre-transfert, outil thérapeutique fondamental des psychothérapies conjointes parents-bébé

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Depuis l’introduction par Freud en 1910, lors du congrès de Nuremberg, du concept de contre-transfert, celui-ci s’est étoffé avec ses successeurs et particulièrement avec le concept d’identification projective. Actuellement, le travail du contre-transfert est reconnu comme un des leviers thérapeutiques principaux dont le psychanalyste se sert pour faire évoluer le processus analytique. le travail psychanalytique conjoint parents-tout jeune enfant nous confronte à des vécus contretransférentiels massifs dont la complexité, la diversité et l’intensité nous semblent spécifiques de ce type de clinique. Pour F. Guignard et D. Houzel (1989), les mouvements contre-transférentiels, en psychanalyse du jeune enfant, sont amplifiés car ils ont à prendre en compte une multiplicité d’éléments qui ne sont pas présents dans l’analyse d’adultes, tels que l’immaturité du fonctionnement psychique naissant de l’enfant, les relations particulières avec son entourage et ce que nous pouvons ressentir des enjeux parentaux dont l’enfant est l’objet. Il est clair que la complexité des mouvements contre-transférentiels auxquels l’analyste doit faire face, est considérable. Celui-ci doit tenir compte de tous les mouvements identificatoires dans lesquels il est pris, vis-à-vis de tous les protagonistes et de toutes les positions dans la famille. la nature primaire de l’expression du tout jeune enfant, la place du corps, les expressions parfois très bruyantes de celui-ci, nécessitent une compréhension approfondie du fonctionnement mental primitif et une capacité de régression aux niveaux archaïques de celuici. « Cette compréhension requiert que l’analyste ait un contact intense et constant avec son propre inconscient, en quête d’indices permettant de saisir les significations du jeu et des communications non verbales de l’enfant » (Guignard, Houzel, ibid.). Ces vécus nous envahissent d’emblée, de front, beaucoup plus fort que dans d’autres situations cliniques et, ceci, souvent, dès le premier contact téléphonique, pour la prise de rendez-vous. Il nous paraît indispensable de les accueillir, d’essayer de les repérer dans leurs diverses expressions, conscientes et inconscientes, de les identifier et de les élaborer ensuite car c’est cette analyse de ces mouvements contre-transférentiels qui constitue, à nos yeux, un outil essentiel dans le processus thérapeutique. Nous vous présentons deux situations cliniques pour illustrer notre propos. Afin de mettre le mieux possible en évidence nos sensations, nos émotions, nos figurations et nos réflexions contre-transférentielles en lien avec les divers transferts en jeu dans les situations cliniques présentées, nous avons choisi de vous les faire partager au fur et à mesure du déroulement des séances. en effet, la participation contretransférentielle ne peut se concevoir, d’après nous, qu’en interaction intime avec ce qui naît, de façon manifeste et latente, de la relation thérapeutique et de ce qui vient solliciter le psychisme de l’analyste tant consciemment qu’inconsciemment. Comme vous le verrez, nos vécus contre-transférentiels se manifestent, au cours des séances et dans leur après-coup de manière variée, sous forme de manifestations corporelles, de sensations, d’émotions, d’images, de métaphores, de représentations, d’associations de pensées, conscientes et inconscientes. Nos vécus contre-transférentiels apparaissent ainsi dans une temporalité différente selon que nous en prenons conscience immédiatement ou qu’un travail d’analyse et de perlaboration plus ou moins laborieux et complexe est nécessaire pour les reconnaître et les identifier. .

Christine Desmarez, Claire De Vriendt-Goldma

RBP
n°57 Pagesp.83-P.110

2010