D’un temps de transition (2) : 31 août 2020

Tanguy de Foy

16/11/2020

psychanalyse et perspective écosystémique

Delen op

C’est la rentrée. Les Petites mains entament, a priori, le dernier mois de leur tentative de mise en lien des citoyens et des associations, collectifs institutions… pour la mise en œuvre d’un temps de transition.

A la faveur de la crise engendrée par la pandémie du corona-virus, un évènement extraordinaire a eu lieu : la mise en suspend de la machine socio-économique et, partant, la possibilité incroyable de « bifurquer ».

Ce verbe, proposé par Bernard Stiegler et le collectif Internation, pour appeler à une mobilisation contributive pour sortir notre société occidentale de la vulnérabilité dans laquelle la plonge le système industriel dans lequel nous sommes pris, signifie notamment « reconstituer une économie politique réarticulant les savoirs et les pratiques locales avec les circuits macroéconomiques[1] ».

Pour soutenir cette bifurcation, nous disposons de savoirs déployés depuis de nombreuses années déjà qui continuent à être maintenus vivants grâce à la contribution de citoyens, d’associations, de collectifs … Ces savoirs restent pourtant dans les bibliothèques ou sur les sites internet et n’accèdent aux territoires que nous habitons que de façon restreintes : des villages en transition, des zones à défendre, des réseaux d’échanges … Les verrous économiques de la transition[2] se maintiennent et nous restons impuissants à transformer un système par ailleurs très addictif.

La proposition des Petites mains est de prendre un temps de transition, avec la double difficulté que ce temps est toujours déjà pris par notre système socio-économique et que toute dynamique de transition nécessite de se laisser à une rêverie insécurisante en ce qu’elle nous déplace de nos repères habituels, tout aliénants soient-ils.

Nous avons donc, jusqu’ici, fait face à la perplexité

  • du citoyen soucieux de renouer avec un système qui pourtant l’étouffe : l’étouffement incite paradoxalement à se cramponner à ce qui menace ainsi de nous abandonner ;
  • des associations éreintées qui se mobilisent depuis des années pour faire passer un message qui flotte entre sa production et sa réception : ni tout à fait annulé, il n’est jamais vraiment réalisé.

Nous restons optimistes néanmoins : 132 personnes ont signés la pétition, 120 personnes sont abonnées à notre page FaceBook, 25 associations, coalitions, collectifs … ont accepté d’apporter leur soutien moral à la démarche. Cela forme un réseau susceptible de rassurer autant que possible d’autres citoyens, groupes, institutions … pour prendre ensemble cette Bastille qu’est devenu le temps aliéné de notre système capitaliste.

Nous continuons à rassembler des associations qui partagent l’idée qu’un temps de transition est nécessaire (derniers arrivés : Construire un déclin et Citizens for Climate), nous voudrions proposer ensuite un message signé collectivement et transmis à nos collègues enseignants, soignants, ouvriers, indépendants, artistes … pour les inviter à mettre en œuvre, dans leurs territoires professionnels ou leur quartier, un temps de transition pour réfléchir à nos manières de travailler, de consommer, de participer à la vie politique, pour se rappeler l’urgence climatique, les effets de l’évasion fiscale, et ouvrir une réflexion sur une économie collaborative productrice de savoirs et de saveurs.

Nous invitons, dans la lettre ci-joint, tous les acteurs de la société que nous sommes,

  • à contribuer à ce temps de transition en l’adaptant à chaque réalité professionnelle, sectorielle, territoriale ;
  • à faire mouvement ensemble pour ne pas laisser les initiatives se perdre dans l’entropie de la désorganisation ;
  • à profiter de la rentrée et de l’énergie qui se fait sentir pour mettre en place de nouveaux repères.

Nous souhaitant bonne chance,  quel que soit les suites, je vous envoie les salutations cordiales des Petites mains.

Tanguy de Foy

 

[1] B. Stiegler (sous la direction de) avec le collectif Internation, Bifurquer, Paris, 2020, Les Liens qui Libèrent.

[2] SAW-B, Les verrous économiques de la transition, Etude 2019.