Editorial
Flagey, Danielle
Les articles de ce numéro ont affaire au fonctionnement mental psychotique.
Les rapports de la psychanalyse avec la ou les psychoses ont toujours été ambigus, la cure type ne s'adressant pas à ces affections, du moins dans leurs formes franches.
Cependant, de tous temps, les analystes se sont intéressés au fonctionnement mental psychotique et à son abord clinique. Freud lui-même fut parmi ces pionniers. Mais il le fit toujours avec une prudence qui tenait compte de l'étiologie pluridimensionnelle dans ce domaine. Nous en voulons pour témoignage cette petite phrase, parmi bien d'autres. A propos de la mélancolie, il nous dit : «… un facteur vraisemblablement somatique se manifeste dans la sédation régulière de l'état dans la soirée, phénomène qui ne s'explique pas de façon psychogénétique. A ces considérations, se relie la question de savoir si une perte du moi sans que l'objet entre en ligne de compte (une affection purement narcissique du moi) ne suffit pas à produire le tableau de la mélancolie, et si un appauvrissement d'origine toxique en libido du moi ne peut pas donner directement certaines formes de la maladie» 1.
Cette remarque à propos de la mélancolie situe bien le discours psychanalytique sur la psychose : décrire les processus psychiques laisse la porte ouverte à toutes les hypothèses étiologiques.
Au niveau de la réalité psychique règne une causalité spécifique : certains fantasmes en engendrent d'autres, des phénomènes de projection déterminent l'introjection d'objets imaginaires modifiés, des représentations suscitent des défenses, le moi se construit à partir des introjections identificatoires, etc…
Mais de l'extérieur pèsent sur la réalité intrapsychique d'autres facteurs, hors champ pour le psychanalyste. Nous les trouvons du côté du biologique, comme c'est sans doute le plus souvent le cas pour les psychoses franches, nous les voyons du côté de l'environnement, comme pour certaines psychoses infantiles. A l'heure des neuroleptiques et des antidépressifs, des malentendus peuvent naître si on n'y prend garde. L'accès au travail dans le champ intrapsychique n'est ouvert qu'à la condition d'une maîtrise suffisante de ces facteurs extérieurs.
Dans son article, L. Vaneck nous montre de façon dramatique la pesée des facteurs d'environnement destructurant chez des enfants psychotiques traités dans une institution qui cherche à travailler, en parallèle, sur le milieu et sur la réalité psychique. […]