Notes de lecture

Godfrind, Jacqueline

1990-04-01

Notes de lecture

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Ce livre est la réédition d'un volume publié en 1975, actuellement épuisé. Son contenu reprend le "rapport" présenté au Congrès des Psychanalystes de Langues Romanes en avril 1973.

Ce travail, que j'avais beaucoup apprécié en son temps, garde toute son actualité pour qui s'intéresse, comme le rappelle l'auteur, à "ce qui fait courir" l'homme et le "pousse en avant, toujours en avant".

Les problématiques narcissiques sollicitent aujourd'hui l'attention toute particulière des psychanalystes. Leur compréhension selon une approche que le lecteur, immergé dans des notions plus "modernes", peut ressentir comme dépassée, s'avère, au contraire, riche de renouvellement conceptuel.

Comme tout travail destiné à un "rapport" d'un Congrès des Psychanalystes de Langues Romanes, l'ouvrage comprend une importante recherche sur le concept d'"idéal du Moi" à travers la littérature psychanalytique, document d'autant plus précieux qu'il est éclairé par le fil conducteur des hypothèses de J. Chasseguet et vitalisé par la présence permanente de la clinique.

Ces références bibliographiques ne représentent qu'une petite partie du livre. En articulation avec les réflexions antérieures de l'auteur (je pense à ses livres sur – et dans – la "sexualité féminine"), le lecteur redécouvre également les fondements des développements ultérieurs de J. Chasseguet. Ainsi des chapitres consacrés à l'idéal du Moi et la perversion ; l'idéal du Moi, l'état amoureux et la génitalité ; l'idéal du Moi et la sublimation dans le processus créateur 1.

Sans doute, le postulat de base de J. Chasseguet reste-t-il pour moi sujet à discussion : on sait que l'auteur se réfère à la notion de "narcissisme primaire", état premier dont la perte installe une blessure entre l'idéal du Moi, héritier dudit narcissisme, et le Moi, blessure que tout humain doit gérer sa vie durant pour le meilleur et pour le pire. Les théories d'aujourd'hui battent en brèche la notion de "narcissisme primaire" au profit des considérations sur les interactions au sein de la dyade mère/infans et de ses avatars. Mais, sur le terrain de l'analyse, quelles qu'en soient les théorisations quant aux origines, c'est bien l'aménagement de l'angoisse humaine suscitée par l'inéluctable conflit entre l'affirmation de soi et l'imprégnation des exigences d'autrui qui reste un pôle essentiel du travail analytique. En cela, les divergences avec un auteur comme J. Chasseguet dont la théorie s'alimente aux sources de la riche expérience clinique, n'altèrent en rien un apport original et fécond.

1 Cf les ouvrages de J. Chasseguet parus par la suite : Ethique et esthétique de la perversion, 1984,. Seyssel, Champ Vallon.

Les deux arbres du jardin, Paris, Des femmes, 1988 (que j’ai présenté dans le numéro 14 de la Rev. B. Psychanal.).