Intimement associé au mouvement psychosomatique dès son épanouissement en France dans les années 1970, CAIN reprend dans cet ouvrage des travaux personnels déjà anciens sur les dyskinésies biliaires et les maladies du pancréas, comme par ailleurs une vaste littérature internationale concernant les maladies allergiques, et les réexamine à la lumière des conceptions actuelles en clinique et en recherche psychosomatique.
Il aborde ensuite l'importance du regard et du temps, éléments qui confèrent, selon lui, à l'économie psychosomatique, des caractéristiques propres. Depuis "Le Symptôme Psychosomatique", paru en 1971, en effet, le psychanalyste a changé, tout autant que l'objet fondamental de son investigation dans le champ psychanalytique : seule a persisté la tentative d'en repérer parfois la signification des manifestations dans le cadre de la relation thérapeutique.
S'il doit exister un jour une nosographie psychanalytique originale de "la chose psychosomatique" comme la désigne l'auteur actuellement, il s'agira d'une nosographie en continuité mais aussi en rupture de celle élaborée de manière évidente dans la clinique des névroses, et à un moindre degré, faut-il le rappeler, dans les psychoses de l'adulte, c'est au niveau de la relation transférocontretransférentielle qu'elle trouve, plus que jamais, sa spécificité.
Partant à la fois de son écoute psychanalytique personnelle et de son expérience déjà ancienne de supervision de groupes "à la Balint" de généralistes, CAIN souligne, à juste titre, les difficultés particulières de tout un chacun dans l'approche, de sens analytique, du corps malade, dans ce "corps à corps" de la relation thérapeutique dont parle par ailleurs M. SAPIR dans une perspective plus "médicale".
CAIN décrit avec une grande finesse, à ce propos, les oscillations constantes de l'analyste lui-même dans la cure, comme par ailleurs celles du généraliste entre des positions contre-transférentielles corporelles et/ou psychiques dans la relation thérapeutique ; oscillations également entre une position de résonance psychique en écho, signant des capacités identificatoires évidentes, à une surdité apparente, témoin de contre-identifications défensives fréquentes ; il souligne enfin que la position contre-transférentielle la plus pernicieuse, hélas dans notre expérience personnelle comme dans la sienne d'ailleurs, demeure depuis les origines de la "psychosomatique", le recours à des constructions théoriques de plus en plus élaborées et dès lors éloignées de la clinique ; c'est ce que signalait d'ailleurs avec force GRINKER, lors de notre formation à l'Institut de Psychanalyse de Chicago par rapport à la théorie prévalente à l'époque, celle de la "spécificité" d'ALEXANDER. Ainsi, succède actuellement en "psychosomatique" à l'évidente facilité de théorisation que nous pouvions tenter d'entretenir dans les années 50, une période de réflexion critique, certes, parfois douloureuse en outre vis-à-vis de nos "certitudes d'auteur", mais indispensable à l'élaboration clinique de ce que nous donne à voir et à entendre le corps malade tant dans la relation singulière de la cure, "théâtre obscur du corps", que dans nos supervisions de thérapies de malades somatiques graves.
Depuis une dizaine d'années, les analystes, quels que soient leurs "préjugés" théoriques, tentent de reformuler la place du corps réel, du corps malade, dans la cure ; CAIN nous permet d'y réfléchir autrement ; qu'il en soit remercié, tant pour la profondeur de sa réflexion que pour la qualité de la forme dans laquelle il l'exprime.
Une bibliographie très complète ajoute encore si besoin était, à la valeur de cet ouvrage qui vient à son heure compléter utilement la bibliothèque de tout analyste.
