Notes de lecture

Denis, Anne

1988-10-01

Notes de lecture

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Repérer le lieu psychique où les représentations sont effectivement actives. Constituer une topique subjective (singulière) par la pensée c'est-à-dire un mouvement qui ignore ce qui le pousse tout comme la forme achevée où il pourrait trouver le repos. Maintenir l'écart pour délier tout ce qui fait masse. Refuser tout appareil de croyance ; l'idéal ne saurait se déléguer sans s'avilir. Et encore : rupture, épreuve de l'étranger, émigration, exil, transgression et attrait des oiseaux. Rassemblées ainsi, les expressions de J.B. Pontalis perdent le caractère d'understatement qu'elles présentent dans la succession des textes qui composent son dernier livre. Le rigueur et la rectitude, ici indissociées, apparaissent comme constitutives d'une pensée qui maintient son ancrage à la pulsion, à l'enfance, au rêve et à la douleur. De ces qualités apparemment contradictoires naît un savoir sur le travail discret qui opère insensiblement la transformation ("mutation") de la répétition tautologique à l'issue métaphorique. Ce n'est pas affaire de batterie conceptuelle ni même affaire de mots car c'est lorsque les mots manquent que la parole apparaît. Nous sommes aussi avertis que ce n'est pas non plus affaire de relation à l'objet : mis en avant (par qui ?) il bouche et mobilise le jeu des représentations. Encore moins de thérapeutique dont le lien avec la désexualisation est démasqué.

Alors, c'est quoi la psychanalyse aujourd'hui ? La liberté de penser journalière qui doit être acquise par l'analyste a toujours et partout été décrite comme soumise à une régression topique ; l'attention flottante, l'informe, la patience chez Freud, Winnicott, Bion – pour ne citer que des psychanalystes -sont autant de manière de dire que le travail de l'inconscient ne peut s'accomplir que dans l'abandon des processus secondaires. Aussi, la métaphore de l'exil, utilisée par J.B. Pontalis, vaut aussi bien pour les objets perdus de vue que pour soi-même en tant qu'entité narcissique : il s'agit également de se perdre de vue. Mais ce point d'exil est en même temps le point de perspective ou de vision. Désapprendre à voir … pour que l'invisible apparaisse. Bien difficile, en vérité, lorsque la pulsion scopique (pulsion partielle exercée derrière une vitre) a été magnifiée.