Notes de lecture

Watillon, Annette

1992-04-01

Notes de lecture

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Ce livre rassemble des conférences données par D.W. Winnicott à des pédiatres, des médecins généralistes, des infirmières, des sages-femmes, des institutrices d'école maternelle et des parents.

Dans un langage très simple n'utilisant aucun terme psychanalytique, Winnicott y développe ses idées sur la grossesse, la naissance et les débuts de la vie. Calmement, avec humour et poésie, il aborde des thèmes graves et exprime sa confiance dans la compétence des mères et dans la justesse de leurs intuitions concernant les besoins du bébé.

Il met en garde contre les "intrusions" médicales faites de conseils et d'impératifs qui perturbent l'évolution d'un phénomène naturel dont le bon déroulement ne demande de la part de l'entourage, aucune connaissance scientifique. Il écrit (p. 100) : "Il ne s'agit pas d'apprendre aux mères à être mères, il faut amener les médecins et les infirmières à comprendre gu'ils ne doivent pas intervenir (souligné par lui) dans les mécanismes délicats à l'oeuvre lors de l'édification des relations interpersonnelles, comme celle qui se noue entre le bébé et sa mère".

Bien entendu, il parle de la "mère ordinaire normalement dévouée", mais évoque la possibilité de défaillances maternelles en essayant d'être le moins culpabilisant possible : "il faut pouvoir dire, sans blâmer quiconque : ici la fonction de la mère ordinaire normalement dévouée a fait défaut ; cela n'a rien à voir avec la responsabilité morale". Dans le dernier chapitre il précise que lorsque les défaillances humaines ont été reconnues, puis réparées par la mère, elles constituent aussi une forme de la communication entre elle et son bébé.

Je n'ai trouvé dans ce livre aucune nouvelle notion mais bien une manière très simple et directe de faire connaître les classiques théories Winnicottiennes. Par contre, quel plaisir de lecture ! Le style révèle l'homme avec sa capacité d'aimer l'humain et de s'identifier à la souffrance d'autrui. Avec son tact habituel et un humour typiquement british, il se permet de partir en guerre contre les pédiâtres qui ne considèrent pas le bébé comme un être humain et qui n'attachent pas assez de prix au développement de la psyché. Il dit (p. 45) : " A mon avis, dès le début, la santé psychique de l'individu dépend de la mère qui assure ce que j'appelle un environnement facilitant, c'est-à-dire un environnement dans lequel les processus de croissance naturels du nourrisson et les interactions avec l'environnement évoluent selon le modèle dont il a hérité. La mère établit sans le savoir les bases de la santé psychique".

Dans le cinquième chapitre, il aborde la délicate question : "à partir de quel moment peut-on parler d'individu ?" posée par le Dr. Fischer, archevêque de Canterbury, dans une lettre adressée au Times le trois décembre 1966, à propos de l'avortement.

Le dernier chapitre est particulièrement intéressant car il constitue une synthèse du développement de l'interaction mère-enfant, avec en parallèle une réflexion sur la psychanalyse et sur la communication entre le patient et l'analyste. L'adaptation réussie d'une mère à son bébé (et moi je lis en filigrane : d'un analyste à son analysant) donne un sentiment de sécurité et de continuité, la certitude d'avoir été aimé.